Planes - Mudflow

samedi 9 janvier 2010

Il me semble que cette histoire commence un matin de décembre 2008: très certainement frigorifié par d'insupportables températures hivernales avant l'heure (comprendre +5°C, oui je suis frileux), il n'aura pas fallu meilleur alibi à mon côté routard pour qu'il me soumette la fatidique question "alors mon grand, on part où en 2009 ?"

En soi, cette question n'a rien de difficile; des endroits où j'adorerai aller, j'en ai plein le fichier Word. La vraie question était plutôt "quand part-on ?". En effet, entre les études d'Anne Cécile, ses examens, ses stages et le bonheur de partir hors saison, il a été délicat de composer une réponse satisfaisante. "Et pourquoi pas les vacances de la Toussaint ?" me dit-elle, "les gens de l'année au dessus de moi ont dit que c'était encore tranquille côté travail à l'école". Banco !

Maintenant, où ? Il faut dire que le Mexique a mis la barre très haut avec son subtil mélange de culture, d'histoire, de paysages variés, de plages de rêve et de vie sous marine très riche. Ce dernier paramètre étant devenu d'autant plus important qu'Anne Cécile est désormais plongeuse certifiée elle aussi.
On lorgnait un peu l'Asie du sud est après avoir vu à des photos de la Thaïlande et du Cambodge mais il semblait qu'octobre-novembre n'était pas la période idéale pour cette partie du monde (un truc qu'ils appellent "La Mousson" il parait, ça nous a un peu refroidit).

Du coup, j'ai fait comme dans la vie de tous les jours, quand j'ai une question: j'ai appelé mon pote Google. Il a un avis sur tout et, la plupart du temps, je le trouve pertinent. "Où partir en octobre ?" lui ai je donc demandé. Sa 5ème réponse me renvoie sur un chouette site sobre au possible et concis: capaustral.com. Pour chaque mois de l'année, une liste de pays; pour chaque pays, une petite fiche des saisons, des températures et des jours de pluie par région. Bref, ma Bible 2.0!

Alors en octobre... A... Afrique, Amérique, Asie... mhmm la Birmanie/Myanmar, la Corée du Nord, le Timor... mouais c'est pas la teuf en Asie en cette saison. Ah tiens je n'avais pas vu ça: L'In-do-né-sie ? Y'a quoi là bas ? C'est joli ? Je vais voir ça dans Google Images (oui ! je suis un gros geek qui n'écoutais pas les cours de géographie, je sais).

10 mois plus tard, le 17 octobre 2009 à 11h00 du matin très précisément, me voilà, seul, à Paris dans un avion de la compagnie Eva Air pour un vol à destination de Jakarta, Indonésie avec escale à Taipei, Taiwan.

All Alone - Gorillaz

Ceux qui connaissent le calendrier des vacances scolaires sur le bout des doigts (et ils sont surement très nombreux à me lire) auront évidemment remarqué que le 17 octobre 2009 ne correspond pas aux vacances de la Toussaint: on vous la fait pas à vous hein !

En effet ! En fait le soucis, c'est qu'une fois sur Google Images, pour savoir si le pays était chouette, je me suis retrouvé pris au piège de The Internet, surfant pendant plusieurs heures sur des forums remplis de récits et de photos de voyageurs, ou sur des sites touristiques spécialisés. Car oui, en plus d'être sublime, le pays possède une diversité étonnante de choses à voir et à faire: 17 000 îles (le plus grand archipel du monde), 275 millions d'habitants, je me demande encore comment j'ai pu passer autant de temps sans m'intéresser à ce pays.

Du coup, ça a été dur de choisir parmi les îles qui avaient retenues mon attention: Java pour ces volcans, son mélange de vestiges hindouistes, bouddhistes et sa culture musulmane ? Bali "l'île des dieux", paradis reconnu pour ces paysages et ces temples superbes ? Lombok et les Gilis, épargnées du tourisme et donc réputées plus authentiques ?


L'archipel indonésien avec les îles de Java, Bali et Lombok.

Comme je suis un gros faible et que je ne sais pas faire des choix, j'ai préféré faire les 3 ! Et comme en 15j c'etait un peu sport et qu'à la base ce sont quand même des vacances, j'ai décidé de partir une semaine avant ma douce (à son grand damn), de faire un petit tour de Java et de la rejoindre à son arrivée à Bali.

Pour être honnête, un peu d'appréhension à partir seul. C'est la première fois et sur un continent que je ne maîtrise pas en plus... Le bon point c'est que ce sera l'occasion pour moi de me forcer à rencontrer les gens, aussi bien routards que locaux. Surtout que toutes les sources s'accordent à dire que les Indonésiens sont des gens chaleureux et d'une gentillesse inégalée. À vérifier donc !

Earthquake - Little Boots

Ce qui est pas terrible par contre avec l'Indonésie, c'est que comme c'est placé précisément à l'intersection de plusieurs plaques tectoniques, on n'est jamais à l'abri d'un tremblement de terre ou d'un tsunami (cf le dévastateur tsunami de 2004). Du coup, tous les jours on va sur le site de l'ambassade française en Indonésie en croisant les doigts pour rien de grave n'arrive.

- 30 septembre 2009, un séisme sur l'île de Sumatra (voisine de Java) fait 1200 morts et 3000 disparus. Flute...
- 16 octobre (J-1), un séisme à 42kms de la côte ouest de Java. Pas de morts et pas d'alertes tsunamis. C'est pas passé loin.
- 17 octobre, ça fait 1h30 qu'on aurait dû décoller déjà. Depuis mon hublot, j'assiste à un ballet incessant de mécaniciens qui n'arrêtent pas de plonger dans le moteur de l'aile pour y retirer plusieurs pièces mécaniques à l'état de santé incertain. Ce qui me panique le plus, c'est que je n'en vois aucun remettre d'autres pièces à la place... Rassure toi Nico, la compagnie est Made in Taiwan mais ça n'a plus la même signification qu'il y a 10ans.

Finalement le vol se fait sans encombres (j'ai quand même surveillé de temps à autre la turbine... comme si ça pouvait changer quelque chose). Nous parcourons les 13200kms qui nous séparent de Taiwan en 13h. À bord, j'ai droit à un avant goût de maison de retraite: regarder films, manger, boire, aller aux toilettes, dormir, recommencer (parfois dans un ordre différent)... D'ailleurs note pour plus tard : ne pas aller au ciné les 2 mois précédant un vol international sinon il ne restera que les daubes dans le programme de l'avion (et le temps passe encore moins vite devant un mauvais film).
Toutefois, je doute que je puisse trouver un jour une maison de retraite, depuis laquelle je puisse admirer les steppes enneigées du Kazakhstan en regardant par la fenêtre.


De gauche à droite: ok le réacteur va bien, ok le réacteur va bien... - déjeuner ou diner (selon le fuseau horaire de référence) devant une daube avec John Travolta (pléonasme) en vost chinois - les steppes enneigées Kazakhs.

Au milieu de l'appareil un écran géant nous informe en temps réel de notre position et de l'itinéraire parcouru. Alors que je m'étonne de l'itinéraire choisi (on est descendu jusqu'en Inde et on survole la Thaïlande, alors que Taïwan est beaucoup plus haut), j'entends le passager de devant expliquer à son voisin que, comme Taïwan et la Chine sont en mauvais terme depuis que cette première a pris son indépendance, les compagnies aériennes taïwanaises n'ont pas l'autorisation de survoler son voisin chinois... Je comprends mieux pourquoi les vols Air France mettaient 2h de moins pour le même trajet :-).

À une vache près, ça donnait un truc du genre (en frôlant encore plus les frontières chinoises):



Fast Fuse - Kasabian

Au bout de 13 longues heures, l'indicateur de position nous signale que nous sommes enfin à proximité de notre destination: Taipei, capitale de l'île de Taïwan. Sauf que... c'est quoi cette arnaque ? Quand je regarde par la fenêtre, je vois bien qu'on est toujours au dessus de Beauvais : y'a des champs, des villages et des champs... Où est l'exotisme asiatique qu'on m'a vendu ? Tu vas pas me dire que le pilote a tourné en rond au dessus de Roissy pendant 13h.
Et ce n'est pas parce que le technicien au sol a les yeux bridés et que c'est écrit avec des signes bizarres partout que je vais croire à votre comédie... On est dans le Truman Show non ?



Les portes de l'appareil s'ouvrent enfin et la température et l'humidité locale envahissent l'habitacle: pas de doutes, ce n'est pas la France. Par contre, comme nous avons atterrit avec 2 heures de retard, j'ai à peine le temps de goûter à la chaleur tropicale, que déjà le staff de la compagnie se jettent sur nous pour nous redispatcher vers notre destination finale. Il est 2 heures du matin, heure française et l'avant dernière chose dont j'ai envie, c'est de courir... En même temps, la dernière, c'est de louper mon avion donc bon...

Et c'est repartit pour 3800kms /5h30 en mode maison de retraite à destination de Jakarta, capitale de l'Indonésie ! Mon estomac cherche à comprendre ce qui lui arrive quand je lui envoie un petit déjeuner à 3h du matin. Contrairement au précédent vol, le paysage extérieur est beaucoup plus appétissant : on survole la Malaisie et les premiers atols indonésiens. Miam !
Par contre, grosse déception au moment de survoler l'équateur, je n'ai pas réussi à apercevoir la ligne noire qu'on voit sur tous les globes (j'hésite à mettre un smiley pour montrer que c'est une blague).



Le vol se passe vite et bien: beaucoup de place pour les jambes (un luxe !) et, pour ne rien gâcher, des hôtesses tawainaises aussi charmantes que souriantes (ce qui est aussi le cas des hôtesses d'Air France évidemment, sachant qu'elles ne sourient jamais).

Avant d'arriver à destination, on nous distribue le traditionnel formulaire d'arrivée à remplir. Pas de questionnaire "êtes vous un ex nazi" à l'américaine mais plutôt une phrase qui retient mon attention sur le premier volet : "Death penalty for drug traffickers under Indonesian law". Et là on se rappelle Michael Blanc en prison depuis 10ans pour avoir tenté de faire rentrer 3kg de hash à Bali... Pas glop.



In Transit - Albert Hammond Jr

Comme si toutes ces heures de vols ne m'avaient pas suffit, j'ai droit à 1h de queue dans la cohue totale pour passer à l'immigration. Pendant ce temps une dizaine de taiwainais jouent des coudes pour remonter la file. Je me fais un grand plaisir de les insulter en anglais quand ils me poussent et me devancent mais ils m'ignorent complètement. Dommage que je ne parle pas chinois.

Il est 14h10 heure locale (soit 8h30 heure française) et après 21h de vols et d'attente, j'entre officiellement sur le sol indonésien ! L'aéroport est tout pourri, tout le monde fume partout (même dans les ascenseurs), des porteurs me hèlent dans tous les sens pour me louer leurs services, il fait chaud, j'ai encore mes fringues d'un mois d'octobre parisien sur moi et je suis tout pouilleux et crevé. Bon ok, ce n'est pas vraiment l'image que je me faisais de l'Indonésie... En même temps, on m'avait mis en garde contre Jakarta et je n'ai pas l'intention d'y rester.

En effet un dernier avion m'attend pour rejoindre la ville de Yogyakarta (Yogya pour les intimes) au milieu de l'île. Depuis Yogya, on peut facilement rayonner pour voir les temples et les volcans les plus intéressants de l'île. Et comme y'a presque 600kms entre les deux villes et que l'état des routes est plutôt incertain, autant faire mon bourgeois et reprendre l'avion!



Évidemment le vol qui décolle dans une heure pour Jogja est déjà complet (je vais finir par croire à une conspiration) et le suivant ne décolle que 5 heures plus tard... J'en profite pour bouquiner un peu dans la salle d'attente de la salle d'embarquement. Quand je lève les yeux, je remarque que pas mal de gens et d'enfants ont les yeux rivés sur moi et qui me sourient. Je comprends que je suis le seul "blanc" dans la pièce et comme il ne doit pas y en avoir souvent qui prennent cette ligne... C'est assez déroutant de se retrouver dans se retrouver pour la première fois dans ce rapport là.

Mon voisin de banquette profite du fait j'ai la tête levée pour me demander d'où je viens, ce que je lis et plein d'autres choses sur la France. D'autres gens se mêlent naturellement à la conversation et on me propose de la brioche faite maison. Mon voisin, qui a une cinquantaine d'années, m'explique qu'il économise depuis 30ans pour s'offrir à sa femme et lui un voyage en Europe. Et pas n'importe lequel: celui à 30 000€/pers pendant lequel on se fait promener pendant 10j dans 7 ou 8 pays différents et où on dort dans des hôtels haut de gamme. Il me dit qu'il rêve de monter sur la Rifle Towel à Berlin (qui après un dessin s'avèrera être la Tour Eiffel à Paris).

Dans deux ans il aura l'argent nécessaire; ce sera leur premier et dernier voyage en dehors de leur pays. Étant donné la différence de niveau de vie, j'ai du mal à me représenter la valeur d'un tel voyage pour eux et me sens vraiment privilégié.

Last Flight - Kasabian

On décolle avec 30 min de retard et le vol dure 1h. Arrivé à Yogya, exténué, je saute dans le premier taxi pour parcourir les 5 derniers kilomètres qui me séparent de mon auberge de jeunesse.

Sur la route, c'est la jungle, la vraie ! Outre le fait qu'on roule à gauche mais ça c'est normal, scooters et voitures déboulent de partout faisant fî des différentes signalisations. Le feu rouge n'est là qu'à titre indicatif et je ne parle pas des angles morts. Sur le trajet, on tamponne légèrement 4 ou 5 scooters pas assez réactifs. Personne ne crie, personne n'est choqué: le chauffeur ne peste même pas face aux queues de poisson dont il est la cible... Je suis trop fatigué pour être effaré.



Une fois à l'auberge de jeunesse, je récupère les clés et m'effondre dans mon lit. La chambre côté rue animée a beau être bruyante, mes 28heures de transit ont raison de moi et m'endors sans demander mon reste.

Et demain !?

Demain, c'est à 4h du mat' par le muezzin (ggrrrr) , visite du palais du sultan, du marché aux oiseaux et première confrontation avec la gastronomie locale !

1 commentaires:

laure a dit…

Héhé compagnie taiwanaise??? t'as pas peur de mourir toi :)
pour la petite histoire pour survoler un pays il faut avoir des droits de trafic et les droits de trafic ca se paye :) voila pquoi parfois tu te retrouves sur des trajectoires plus qu'improbables :)