L'Usine à Films de Michel Gondry

lundi 11 mars 2013

Vous êtes vous déjà demandé comment on réalisait un film? Si oui, Michel Gondry a pensé à vous. Pas besoin de millions de dollars, d'un casting de rêve ou d'effets spéciaux en cascade : 4h de votre temps, une caméra, quelques décors de fortune et une équipe motivée suffisent: de quoi se prendre pour Jack Black et Mos Def dans Be Kind Rewind sauf qu'ici on se swede pas les films connus, on fait le notre! C'est en tout cas l'idée derrière "l'Usine de Films Amateurs" de Michel Gondry, atelier itinérant qui a déposé ses valises au Centre Georges Pompidou du 16 février au 30 mars 2011.




Lucky Ones - Lana Del Rey

Pas besoin de vous dire que quand des projets comme celui-ci posent leurs valises à Paris, les places sont chères: si bien que, quand Anne-Cécile a découvert cet atelier dans un reportage du Grand Journal de Canal, tout était déjà archi-complet... Petite lueur d'espoir: le site de Beaubourg mentionne que quelques places seront disponibles au compte-goutte sur place pour les séances du dimanche (une par heure): qu'à cela ne tienne, il est temps de prouver que notre chance légendaire est toujours là. Ni une, ni deux, on en profite pour rallier Vincent (grand réalisateur de son état) à notre cause et c'est parti, en route pour l'aventure.

Dimanche 13 mars 2011, 9h, nous voici tout pimpant devant le centre Beaubourg. Même si ça n'ouvre que dans une heure, il y a déjà pas mal de monde: on garde espoir, en glanant des bouts de conversation à gauche à droite, la plupart des gens ont l'air de faire la queue pour visiter les expositions d'art. Ouf! 10h, les portes ouvrent enfin et on se faufile rapidement jusqu'à la queue de l'Usine à Films: une quinzaine de personnes sont devant nous... Tout est encore jouable... ou presque...

Ou presque... car quelques petits cafouillages viennent perturber nos chances:
- 3 personnes qui se sont trompés de queue en rentrant dans le Centre nous passent devant grâce/à cause d'un couple qui les reconnaît et qui confirment qu'ils étaient devant eux dehors (t'avais qu'à pas te tromper en rentrant patate!);
- évidemment, à cause de ces 3 là, on est recalé pile poil du groupe de 12h. Finalement, c'est un bien pour un mal: ceux qui avaient réservés ce créneau sont des ados et ils arrivent avec un scénario tout prêt, un casting et du matos... Ils ont l'air bien embêté quand on leur signale que ce n'est pas la philosophie de l'atelier et qu'ils vont devoir composer avec 6 personnes supplémentaires (bien fait!!);
- pas de séance à 13h (pause déjeuner);
- vers 13h15, on nous apprend qu'un VIP s'est invité pour la séance de 14h et qu'il n'y aura donc pas de places disponibles pour nous... Quiconque soit ce VIP pistonné, nous le maudissons d'avance.

13h45. Il semblerait que le VIP soit en fait Alain Chabat (on le maudit un peu moins du coup) mais que s'il n'arrive pas d'ici 5min, Alain Chabat ou pas, on pourra prendre quand même sa place. On en est alors à souhaiter qu'Alain Chabat ne vienne, c'est un comble!

13h50. Toujours personne à l'horizon: nos noms sont inscrit sur la fiche du groupe de 14h. C'est officiel, après 5h d'attente, on va tourner notre film amateur... ou presque... euh ça ne serait pas Alain Chabat qui monte les marches là-bas? Tout penaud, Alain s'excuse pour le retard. On est prêt à laisser notre place évidemment (on peut bien attendre une heure de plus quand même) mais la responsable des groupes est inflexible: c'est trop tard (à sa décharge, elle était étrangère et ne connaissait pas l'oeuvre de M. Chabat)! En fait Alain explique qu'il n'avait pas l'intention de participer à l'atelier activement, juste de suivre notre groupe pendant notre session. Chanceux nous? Ça se saurait!


Time Is Running Out - Muse



Petit florilège des décors disponibles: métro, salon, décharge et même des miniatures pour faire des courses-poursuite.

Après un rapide tour des décors mis à notre disposition, nous prenons connaissance de notre planning des prochaines heures:
- 45min de brainstorming pour décider du genre, du titre et du résumé du film (à main levé et en suivant un protocole bien carré)
- 45min dans l'atelier pour confectionner distribuer les rôles, se costumer et confectionner les accessoires qui seront nécessaire au tournage
- 1h pour tourner le film: 1 caméra - 1 prise par scène, pas de retour en arrière dans la bande pas de montage
- 30min pour visionner le film, réaliser la jaquette et graver le DVD.


Reportage sur les ateliers de l'Usine à Films


Brain Stew - Green Day

"Une bonne idée est de choisir deux titres, deux genres et deux histoires et de les combiner pour créer un film encore plus imaginatif"


Le brainstorm est drivé étape par étape par un tableau de commandes.

Le brainstorm est un joli bordel démocratique: après le genre (westerno-documentaire), chacun y va de ses idées de scènes et d'histoire. Le tout se mélange, se tord, se déforme pour aboutir à quatre lignes qui donneront les lignes directrices de notre film intitulé "Soyez Sympas, Dégainez" (hommage évident au réalisateur qui nous a réunit ici). Pas de temps pour les dialogues, les détails ou la mise en scène: le maître mot est "spontanéité". Michel Gondry, de passage, en profite même pour apporter quelques idées... On prend!


Devil in Disguise - Elvis Presley

"On suivrait les pas d'un cowboy qui vit au 21ème siècle et qui partirait à la chasse d'un bandit après l'avoir vu sur un avis de recherche". Il nous manque quelqu'un pour jouer le bandit... quelqu'un avec une gueule reconnaissable... ha mais oui on a Alain Chabat, dans notre groupe! "Alain, tu veux bien jouer le bandit?". Une fois les rôles de chacun bien définis, tout le monde passe par la case accessoirisation. Pendant qu'Anne-Cécile dessine le journal qui contiendra l'avis de recherche, d'autres se fabriquent des vêtements en carton ou des perches de prise de son: système D inside.



Les fiches du générique de début et le fameux journal - La grille de répartition des scènes.


Silence, ça tourne!


Il est maintenant temps d'investir les décors et d'entrer dans son personnage. Les scènes, tournées dans l'ordre, s'enchaînent vitesse grand V. Comme tout le tournage doit rentrer en une heure, les acteurs de fortune n'ont que quelques secondes pour inventer et répéter leur texte: une seule prise et c'est dans la boîte. Chose amusante: alors que nous tournons les premières scènes de notre film, les personnes du groupe d'avant demandent à Alain si il veut bien faire un featuring dans leur film. Celui-ci refuse poliment en leur répondant qu'il préfère rester avec son groupe pour voir le tournage.

Encore une fois, l'exercice est intense mais nous composons avec les règles. 2h de préparation et 1h de tournage pour 4'41 de 7ème art... dont voici le résultat:



Évidemment, même si le résultat est loin de mériter un Oscar, tout le monde prend beaucoup de plaisir à découvrir "son" film et se voir à l'écran. On rigole, on se cache les yeux mais on repart avec le plein de souvenirs et des envies de cinéma. Merci M. Gondry de nous avoir permis de partager votre quotidien!